Loin de nous affliger, on l’aura compris, les graves mésaventures de nos industriels de l’énergie, qui sont récemment venues au jour, nous semblent plutôt de nature à susciter une vraie prise de conscience qui pourrait annoncer, ou contraindre à un vigoureux changement de cap. Cela ne se fera sans doute pas du jour au lendemain, parce qu’il faut nous attendre à ce que tous ceux qui sont responsables de cette situation s’accrochent et continuent à parasiter. Il faut dire que c’est d’un changement profond des pratiques dans les structures supérieures de l’état dont nous avons besoin, avec mise en cause de toute la superstructure technocratique incapable de s’adapter aux nouvelles donnes nécessitant de vraies marges de manœuvre à l’échelon local. Il vaudrait mieux que ce rêve devienne réalité ; sinon, cela risque de tourner au cauchemar.
Ça ne va pas faire braire toutes les vaches des Flandres ! (lien cliquable) Et pourtant, au sud du Quiévrain, que n’entendrait-on : Vent de colère, la FED, les préfets, i tutti quanti. Même pas imaginable qu’un développeur propose des machines qui culminent à plus de 200 m, alors que chez nos voisins, la recherche de la performance optimale est la règle. Il est vrai qu’ils commencent sérieusement à s’inquiéter pour leurs centrales nucléaires : sabotage, fissuration des cuves etc. Mais puisqu' »on » vous dit que ça ne passe pas le Quiévrain. Dormez tranquilles, braves gens, et soyez heureux qu' »on » vous octroie des permis jusqu’à… 90 m de haut. Ce pourrait n’être que 80, ou 70 : les intérêts supérieurs de la Nation sont en jeu, et tout l’appareil d’état, administrations et entreprises nationales, veillent « jalousement » à ce qu’on les respecte !
Heureusement, nos amis allemands nous aident… (lien cliquable) à faire passer la pilule. Alors qu’Areva a annoncé les désastreux résultats que l’on sait (une perte de 4,9 milliards d’Euros pour 2014), les grands électriciens allemands ont eu le bon goût d’annoncer des résultats pas brillants, en baisse pour certains, et même en perte pour E-ON : 3,2 milliards d’Euros. La grande presse française s’est précipitée pour faire le parallèle, sur l’air « on est moins dans la m… quand on n’est pas seul ! » Mais, comme y insiste l’article du Guardian, la perte d’E-ON est pour une petite partie due à une baisse du résultat opérationnel, causée par l’énorme mutation des marchés de l’électricité qui se produit autour de nous et qu’on voudrait bien chez nous traiter pas le déni : tout va bien, avec toujours autant de nucléaire, voire plus, pour les plus enragés. Mais l’essentiel de la perte d’E-ON est constituée de provisions pour restructuration, parce que les Allemands savent bien que la mutation est sans retour et qu’il doivent s’y adapter. Les pertes d’Areva, et bientôt celles d’EDF, sont des pertes d’exploitation qui étranglent ces entreprises, leur ôtant toute marge de manœuvre et les condamnant, pour Areva, à se jeter peut-être dans les bras d’un « sauveur » chinois ou quatari : brillantissime !!!
Et pendant ce temps, Madame Lauvergeon se défend : (lien cliquable) Non, elle n’est pas la seule responsable de la situation catastrophique d’Areva ! Merci de l’information : on l’imaginait sans peine, dans une entreprise entièrement aux mains de l’état et sur laquelle veillent les sommités du corps des mines et tout un tas d’élus, de ministres etc. Est-ce rassurant ?
Et les rats quitteraient-ils le navire ? (lien cliquable) Voilà que les parlementaires ne veulent plus donner de coups de pouce à EDF pour sortir de la mauvaise passe ! Il faut dire que le coup de pouce que réclame EDF est en fait un coup de bambou sur nos factures. Mais c’est un peu tard : avec les règles mises en place en Europe, les concurrents d’EDF sur le marché français s’approvisionnent maintenant sur le marché de gros de l’électricité à des prix inférieurs aux coûts réels d’EDF. Il ya donc gros risque, si EDF « joue » avec les prix, de voir les clients passer à la concurrence, ce qui ne serait pas un bon signal. Comme toujours en France, on a dilapidé quand « tout » allait bien et… nous nous trouvons fort dépourvus quand la bise est venue.
Et pendant ce temps-là, aux Etats-Unis, l’industrie du photovoltaïque crée des emplois à tour de bras. (lien cliquable) Des prix en baisse de près de 15% en 2014, un changement complet de modèle basé sur l’autoconsommation, auquel ne s’oppose pas convulsivement l’appareil d’état (sauf dans certains des états). Et comme il faut quand même et toujours plus d’électricité, les gens, au lieu de travailler chez les EDF et Areva locaux, travaillent chez les nouveaux acteurs du marché de l’électricité : les fabricants et installateurs de photovoltaïque. Sans doute une question de culture : la culture du réalisme et de l’efficacité face à celle des avantages acquis et de la rente de situation. And the loser is…